Publié le 27/03/2016
"Les bougnouls ou les pédés": l'enjeu de Joué-les-Tours
Maria Poumier
- Le 28 mars 2014, Joué les Tours est en ébullition, d’après la presse locale, à cause de certaines directives dans les écoles.
- Le 29 mars, une rumeur circule : une enseignante se serait empressée de mettre à exécution des plus audacieuses recommandations de l’OMS : introduire l’éducation sexuelle à la maternelle, avec exercices pratiques, déculottage de force, bisoux imposés et séance touche pipi en public.
- Le 30 mars, une vidéo postée sur YouTube en témoigne ; le même jour, élections municipales, M. Frédéric Ogis passe avec 224 voix d’avance après avoir proclamé sa répugnance face à la pornification benoîtement rampante du système éducatif : des voix récoltées spécialement auprès des familles musulmanes du quartier de la Blotterie.
- Le 31 mars, avait lieu la troisième grande mobilisation mensuelle des Journées de Retrait de l’Ecole, mouvement informel mais massif d’indignation contre les projets ministériels de banalisation de l’homosexualité, que les instances internationales et nos élites serviles tentent désespérément de dorer d’un voile de respectabilité depuis une dizaine d’années, en défiant systématiquement l’éducation familiale, le bon sens, la sensibilité populaire, et les religions constituées, unanimes pour condamner l’encensement délirant de Sodome et Gomorrhe que nos ubermarchands de chair fraîche veulent imposer à toute la planète.
- Deux ans plus tard, le 24 mars 2016, se tenait au tribunal correctionnel l’audience pour juger du délit de diffamation une jeune maman de Joué les Tours : elle avait tenté de porter secours à une autre mère d’élève effondrée parce que son petit garçon semblait avoir été victime des exercices pratiques ci-dessus.
Et comparaissait, en tant que complice présumée, l’initiatrice des Journées de Retrait de l’Ecole, Farida Belghoul. En dehors de cet épisode le ministère de l’Education Nationale n’a pas encore trouvé de biais pour justifier de poursuites contre elle. Les JRE, avec leur succès reconnu, ont fait un tort immense au dit ministère. C’était un mot d’ordre inspiré des conquêtes syndicales du monde ouvrier et la mise en œuvre immédiate, à l’échelle nationale, du droit de retrait valable pour tout être humain lorsqu’on prétend exiger qu’il se soumette à un ordre contraire au bien commun et à sa conscience.
Les JRE mensuelles de 2014 avaient devancé en popularité et en efficacité toutes les initiatives catholiques de protestation, qui avaient du plomb dans l’aile et du vague à l’âme depuis l’échec de la Manif pour tous, puisque l’immense mobilisation n’avait pas suffi pour empêcher le vote de la loi validant les parodies homosexuelles du mariage en 2013. Les médias avaient, bien malgré eux, multiplié l’audience de Farida Belghoul et l’enthousiasme pour son audace, en relayant ses initiatives ; avec un mépris élitiste classique, leurs directions estiment de bon ton, moderne, progressiste et démocratique, de se saisir de chaque occasion pour conspuer l’obscurantisme réactionnaire qui sévit d’après eux dans le peuple : Farida Belghoul incarnait la convergence des deux espèces à abattre, cathos et « islamistes », comme ils disent, les catégories honnies auxquelles nos castes dirigeantes voudraient réduire tous ceux qui renâclent au devoir de blasphème devenu explicite depuis janvier 2015 et les grandes campagnes de charlification générale, avec répression jusqu’au cœur des familles, et délation obligatoire à l’école.
Mme Blanchet, la présidente, ouvrit la séance avec les meilleures intentions du monde occidental et laïciste : intimider Mme Dalila Hassan sans lui suggérer à aucun moment qu’elle pût avoir droit à la présomption d’innocence. Mais celle-ci ne se laissa pas démonter, et expliqua avec précision son rôle partiel dans l’affaire, convaincant chacun de sa bonne foi, par sa modération et la fermeté de ses déclarations.
Après cette mise en bouche, le gros gibier, c’était Farida Belghoul, dont la réputation n’est plus à faire. Elle prit la parole d’une voix forte, assurée, et eut vite l’occasion d’interrompre le procureur, décidé à sonner le hallali, en lui disant : « je vous interdis de me parler sur ce ton », à quoi il ne rétorqua mie. Elle expliqua posément, preuves à l’appui, pourquoi elle ne pouvait être tenue pour responsable, personnellement, de la mise en ligne sur YouTube de la vidéo qui faisait l’objet du litige, et dont personne n’a exigé à ce jour à ce qu’elle soit retirée, ce qui ne manque pas d’étrangeté, si cette vidéo relève bien de la diffamation. Elle exposa calmement les objectifs des JRE : obtenir l’interdiction de la théorie du genre à l’école. Elle rappela son combat contre la sexualisation précoce des enfants à l’école et les abus sexuels, (dont les exemples se sont multipliés récemment chez des fonctionnaires de l’Education nationale, ce qu’elle a eu la courtoisie de ne pas rappeler). Elle fit réfléchir chacun sur le fait qu’il n’est pas normal de faire des expérimentations locales sur des enfants, en lançant des programmes comme celui de Mme Vallaud-Belkacem, dont les enfants et les parents auraient dû être les cobayes passifs. Elle fit réfléchir les journalistes, en annonçant qu’elle filmait toutes les interviews qu’elle acceptait de donner.
En dehors du Palais de justice, deux armées de supporteurs des deux camps étaient là, les drapeaux syndicaux jaunes brandis haut et fort. D’un côté, enseignants vétilleux, faisant machinalement corps avec leurs autorités de tutelle –situation parfaitement exceptionnelle chez ce corps de métier- dans la volonté d’abattre l’empêcheuse de tourner en rond ; de l’autre, des gens venus de toute la France, animés d’une seule foi : on ne peut pas laisser s’effondrer un pays dans la maladie mentale consistant à aller toujours plus loin dans l’abandon des références traditionnelles qui sont le rempart des civilisations, au seul profit des psys, des patrons inhumains et des régimes à ambitions despotiques, les trois catégories qui ont un besoin vital d’individus atteints par la schizophrénie, ne comprenant plus la notion de fidélité aux règles morales de leurs aïeux, encore moins celle de leurs responsabilités envers les prochaines générations.
On attendait avec impatience d’entendre la plaignante. Elle fut étrangement insignifiante ; seule présence physique, de longues breloques pendant à ses oreilles, contrastant avec sa taille chétive, son effacement vestimentaire, sa platitude sous tous les angles. Questionnée sur l’un des objets d’indignation de la population de Joué-les-Tours, le fait qu’on emmenait les enfants des écoles à la médiathèque communale où s’annonçait à grand renfort d’affiches une exposition de littérature érotique, avec des échantillons sur des tables basses, la piteuse institutrice ne sut pas dire si elle trouvait cela bien ou mal ; la protection de l’enfance ne semblait pas la concerner ; on ne lui a pas appris à envisager de former les futurs citoyens à savoir dépasser les obsessions sexuelles des uns ou des autres. Elle récita son credo : « le mot égalité pour moi c’est très important » (sic). Mais derrière « le mot égalité » il n’y avait rien, si ce n’est la voix de son maître, qui ne se sent certainement pas l’égal des gens du commun.
De toute évidence, la maîtresse est un cas d’individu polytraumatisé, mais on n’a pas pu savoir ce qui, dans les tréfonds de ses secrets existentiels, pouvait l’avoir traumatisée le plus. En effet, chaque fois que les accusées tentaient de mettre sur le tapis la question de la réalité des faits, de la véracité des allégations contre l’institutrice, la présidente leur rappelait une règle bien surprenante pour les néophytes, en matière de droit pénal : la vérité n’est pas une exception de nullité, dans une affaire de diffamation ; il ne s’agissait aucunement de savoir ce qui s’était vraiment passé, mais seulement si cela faisait du tort ou non à la partie civile et si ses adversaires étaient de bonne foi.
Cela n’a nullement empêché les deux avocats de la chétive victime d’insister longuement sur la vérité des faits, précisément ; d’après eux il n’y avait pas de faits, et cela établissaient tant l’innocence complète de leur cliente que la férocité de l’autre partie.
Et pourtant, il y avait beaucoup de faits connexes, et de faits sur lesquels le magistrat instructeur n’avait malheureusement pas demandé d’enquête. Rappelons le premier motif qui avait outré Mme Dalila Hassan, lorsqu’elle avait été sollicitée par une maman horrifiée devant le brusque rejet de l’école par son petit garçon, son hystérie et ses récits tout à fait « gender »: la directrice avait refusé de prendre au sérieux cette maman, ce qui aurait pourtant grandement contribué à renouer le dialogue, et peut-être à faire comprendre les projets pédagogiques qui inspirent les enseignants. C’était une maman tchétchène ne parlant guère que le russe, qui ne s’était jamais plainte de la maîtresse, qui n’avait jamais ennuyé la directrice avec des récriminations.
Autre fait connexe : l’avocat de Farida Belghoul, maître Chautemps, avait fait citer comme témoin M. Ogis, le maire de Joué-les-Tours, parce qu’il s’était vivement engagé aux côtés de la Manif pour tous, avec un tract et une lettre aux parents d’élèves, dénonçant les « abominations » (sic) que mettait en œuvre la ministre de l’Education Nationale. Il est venu, il a joué le jeu, il a confirmé qu’il s’exprimait en tant que catholique, et qu’il avait mis ses enfants dans une école privée ; et il n’a pas été mis en examen pour diffamation de quiconque, malgré la reprise des mêmes indignations que la vidéo incriminée.
Maître Chautemps, le dernier à plaider au bout de cinq heures d’audience, sut se faire écouter, on vit les trois juges changer d’attitude, prendre des notes. Notre société est en pleine déliquescence, elle joue avec le feu, et il est prévisible que les incendies éclatent, que ce soit la fin de la société consensuelle, car « la base et le fondement de la société sont en jeu »: des minorités ne peuvent pas se substituer à la majorité, a-t-il expliqué sans grandiloquence aucune. « Il n’y a pas de fumée sans feu », et la circulaire Peillon a bel et bien été retirée. Le feu couvait à l’école de la Blotterie, l’ébullition de Joué les Tours était faite d’une accumulation d’incidents provoqués par les autorités censément éducatives.
Une directive intitulée « Tomber la culotte » avait circulé, tandis qu’on tentait d’obliger les garçons à s’affubler de jupes, partout en France. A la Blotterie, il y a beaucoup de parents sans papiers ; terrain idéal pour les expérimentations : ces gens-là ne portent pas plainte ...
Et encore un élément du contexte qui expliquait bien le terme « d’abomination » dont avait usé comme M. Ogis Mme Dalila Hassan dans la vidéo incriminée : dans une autre école, de Joué-les-Tours, les enfants du primaire avaient été emmenés voir le film Tomboy, incitation au changement de sexe dès le plus jeune âge, sans que les parents aient donné le moindre assentiment pour ce projet éminemment pédagogique, du moins selon le lobby LGBT local.
Le procureur a fait un brillant réquisitoire sur le mode politique. Toutes les initiatives, d’après lui, étaient parties de Farida Belghoul, malgré ses dénégations, et elle avait dirigé les opérations en stratège, avec un sens aiguisé du « coup de com’ », à partir de l’événement qui pouvait devenir « pain béni ». Chacun des termes utilisé par le procureur pouvait être retourné à l’identique pour qualifier son propre rôle : faire d’une petite affaire locale une grosse machine pour écraser Farida Belghoul, sa Fédération Autonome des Parents Engagés et Courageux, et porter un coup fatal à l’ensemble des résistances chrétienne et musulmane face aux ambitions du lobby LGBT : c’était bien la soumission des nouvelles générations, l’enjeu de ce procès.
Les militants de Sud avaient une banderole : « Ne Jamais Renoncer à l’Egalité filles et garçons » ce qui donne la sigle JRE, ô subtil détournement. Visiblement ils n’ont pas encore réalisé ce que cachaient les ABCD de l’égalité, auxquels Mme Belkacem a dû renoncer après le succès des JRE : A l’avenir Baisser Culotte Devant les manœuvres pour briser la famille, citadelle de toute éducation et rempart contre toute tyrannie étatique : égalité à tout crin pour que les hommes puissent louer des utérus afin de s’acheter des gosses sans mère (GPA pour tous), par exemple, ou que des femmes s’offrent des gosses sans compte à rendre aux pères (PMA pour toutes), ce que souhaite François Hollande, avec en contrepoint l’égalité parfaite entre les pauvres auxquels on aura arraché les dents sur le marché mondial aux esclaves, ce qui exige l’abolition de l’autorité des pères et des mères de famille…
Une curiosité : l’un des deux avocats de la plaignante a invoqué l’autorité des « trois religions abrahamistes » pour condamner la « violence » des JRE : le vendredi saint, le Christ a recollé l’oreille arrachée par saint Pierre à un centurion romain. Et pour faire bonne mesure, il a cité une sourate. La laïcité ne reculerait donc devant aucun argument désormais, manquerait-elle d’eau à son moulin ?
Une personne venue de loin commentait dans le public : « c’est quand même malheureux que les cathos ne se soient pas dérangés pour ce procès. Ils ont choisi les pédés contre les bougnouls. Ils se laissent émasculer, ils le paieront cher ».
Le verdict est attendu pour le 19 mai. Le sursaut des élites est attendu tous les jours. Elles redoutent la convergence, le peuple les méprise.